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Sieste au Cotiella

Publié le par baladesenpyrenees

Sieste au Cotiella
Sieste au Cotiella
Sieste au Cotiella

Nous devons rejoindre l’équipe de Trekking Mule qui campe au bord du lac ou Basa de Armeña, dans le cadre d’une traversée de quatre jours dans le massif du Cotiella.

Cette montagne lisse présente des plis si horizontaux qu’on les croirait dessinés par la main d’un géant. À nos pieds, la flaque verte de la Basa de Armeña reflète la Punta, grand dôme calcaire qui la domine. Alors que nous descendons vers le lac, nous sommes accueillis par les sonnailles du troupeau de brebis. Tout résonne ici et le moindre est amplifié. Le campement de Trekking Mule est installé sur ce tapis vert au milieu d’un désert blanc.

Alberto Iglesias, son chef, nous accueille en expliquant que l’expédition a démarré il y a deux jours de Lavasar, au nord du massif du Cotiella, via le GR 15. Avec le guide de haute montagne, Esteban Juiz Junco, nous partons pour la rando de la journée, le sommet du Cotiella, tandis que les enfants du groupe vont visiter une des nombreuses grottes qui parsèment ce désert calcaire. Car deux papas font partie de l’aventure de Trekking Mule : Franck, un Allemand venu avec sa fille de 12 ans et son fils de 7, et Juan Luis, un Basque, accompagné de son fils de 10 ans.

Nous obliquons à gauche, au sud-est, vers le cirque d’Armeña. Nous prenons de la hauteur entre pelouses et gros rochers, nous éloignant de la face sud de la Serra d’Armeña. Une vague sente cairnée est tracée en direction de la brèche de las Brujas. Elle utilise au mieux la courbe du terrain pour slalomer dans cet immense lapiaz, troué de gouffres, de dolines et de failles. On découvre assez vite que le territoire est habité par les marmottes et les vautours. Des troupeaux de chèvres sauvages et de sangliers y ont aussi pris le maquis tandis que le gypaète barbu gîte vers le Picollosa, au bout de la Serra d’Armeña. Le cirque regorge d’autres richesses : des stations d’edelweiss et des zones de fossiles. À 2 300 m, nous dévions vers le sud-ouest, prenant en ligne de mire la brèche à gauche du sommet, face à nous. C’est le col du Cotiella, passage clé, d’abord défendu par un long éboulis où l’on s’enfonce et patine sur le gravier. On atteint la base d’une cheminée qui mène, en quelques lacets plutôt à gauche, à l’arête du Collado de Cotiella. Le col est un couloir sérieux où il faut mettre les mains. Sa sortie est exposée. On traverse horizontalement toute la face sud de la pyramide sommitale, sur un petit sentier en balcon, qui s’appuie sur une sorte de gradins naturels jusqu’au plateau de la Colladeta, un lapiaz où paissent une vingtaine de chèvres sauvages. C’est là que je me suis allongé pour une sieste réparatrice, le ventre en vrac à cause de médicaments qui devaient soulager une contracture.

Monstre chauve et solitaire, hérissé d’aiguilles, d’arêtes déchiquetées, d’immenses pierriers, oscillant entre le gris et l’ocre, l’étrange Cotiella se dresse là, comme une sauvagerie africaine, une parenté des Arres d’Anie.

Au retour, j’ai retrouvé mes jambes. Nous redescendons prudemment par le même itinéraire. Après la cheminée, nous pouvons faire du surf sur l’immense pierrier. Nous laissons les pierres rebondir dans le vide. Nous découvrons que le troupeau de brebis du matin s’est égayé dans le creux du cirque bombardé de dolines.

De retour au campement, c’est baignade dans la Basa de Armeña pour les papas et pêche aux tritons, crapauds et grenouilles pour les enfants, avant de jouer au frisbee en estive. Après le gros effort de la journée, le soir est d’une savoureuse douceur, comme si la muraille nous protégeait des intempéries. Álvaro Yaque promène ses mules Paloma, Peregrina et Verni jusqu’au lac. Chacun peut monter à tour de rôle sur la mule la plus sage, le temps de se sentir un peu Sancho Pança. Esteban a troqué ses atours de guide pour ceux de chef cuisinier.

Photos François Laurens

Sieste au Cotiella
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